Ici, je tiens à apporter une précision : Je ne suis absolument pas venu dans ce pays pour faire un pèlerinage Lord of the Rings. La destination me trottait dans un coin de la tête depuis bien avant et en faisant les préparatifs, j'avais même écarté l'idée d'aller voir l'un ou l'autre lieu de tournage, ça rallongeait trop les itinéraires pour un bénéfice trop faible. C'est juste en roulant à travers le que je me suis rendu compte que si on ne visait pas le lieu de tournage de telle ou telle scène bien spécifique, Peter Jackson et sa troupe sont quand même passés un petit peu partout, surtout à mesure qu'on s'approche de Wellington. Je ne vais quand même pas bouder mon plaisir, moi qui ai goulument avalé le film, étant fan du bouquin depuis mes treize ans.

Une dernière course enfin, où ma carte bleue est refusée (hein ?) et nous nous mettons en route pour l'agence de location où nous allons laisser la voiture (nous en récupèrerons une autre sur l'autre île.)

Comme il reste un peu de temps, nous faisons un arrêt à la maison natale de Katherine Mansfield. C'est une idée de Julie, mais ça m'intéresse aussi pour un raison n'ayant rien à voir avec la littérature : la maison a été restaurée en 1987 dans son état d'un siècle plus tôt et je suis fasciné de voir, en regardant les photos d'avant la restauration, un intérieur tout à fait typique des années 80 (bien moche quoi, plastique, formica, grosse peinture blanche, fournitures qui doivent apparaître dans les cauchemars de Phillipe Starck) en dessous duquel était donc caché une maison de western.

Après ça, je serai incapable de regarder une autre maison du pays sans me demander ce qu'il y a en dessous des dix dernières couches de peinture.

Parce qu'ici, on se croirait au Far West dès qu'on a affaire à des bâtiments. Autant la campagne (au moins dans l'île du nord, pour ce que j'en sais) ressemble à une campagne anglaise dont le relief (et le plus souvent la flore) serait devenu fou, autant les patelins, remplis de cubes de bois alignés autour de rues principales immanquablement rectilignes, semblent tout droit sortis d'un middlewest américain.

Un employé de l'agence de location de voiture à l'accent à couper au couteau^[1] nous conduit au terminal des ferrys en nous racontant sa visite de la Côte d'Azur et nous prenons la mer. Ce n'est pas un grand trajet et la traversée est sans histoire, mais j'adore sentir le pont tanguer sous mes pas.

À l'arrivée à Picton (un magnifique exemple de rien) nous réceptionnons la nouvelle voiture qui est exactement la même cacahouète que la précédente, à la couleur près, et nous voilà sur la route pour le parc Abel Tasman. Ça ne fait que deux cents kilomètres, mais c'est tellement chargé en virages que ça nous prend plus de trois heures^[2] Je soupçonne la majorité des routes de l'île du sud de ressembler à ça.

À l'heure où nous arrivons, la réception du camping est fermée, alors nous prenons un emplacement au hasard, nous irons leur dire bonjour demain. On notera que ça, c'est la réaction sereine de Julie, moi, j'ai l'impression d'entrer par effraction.

Une fois couchés, nous entendons quelque part dans le camping des français hurler des paillardes. Les français, ça ne devrait jamais sortir. Sale race.