Métaphore

Il fait froid dehors

Éphèse

photo: départ de PergameDebout ! Petit déjeuner, question médicamenteuses sur un anti-nez-qui-coule (Julie est toujours malade) à la bru médecin néerlandaise du propriétaire de la pension et hop : on se cale le sac sur le dos et on se dirige vers l'otogar, qu'on a quand même du mal à trouver - oui, les plans sont meilleurs sur le Lonely Planet que sur le routard, nous le savons ! Le temps de nous rendre compte une fois de plus que décidément non, tous les turcs ne sont pas multilingues, et nous réussissons à avoir un billet de bus jusqu'à Izmir.

Deux heures plus tard, nous voilà arrivés à l'otogar d'izmir, et c'est un autre format que celle de Bergama : c'est énorme et nous sommes trèèèès loin du centre. Il existe parait-il un service de navette vers le centre-ville offert par toutes les compagnies de bus interurbaines , mais ici, pas moyen de la trouver, ni d'ailleurs de trouver quelqu'un pour nous aider. Plus d'autre solution que d'essayer de suivre les indications du Routard pour aller dans le centre en bus local, mais ça non plus, ce n'est pas facile : nous avons déjà du mal à trouver le terminal de bus, mais pour trouver le bon, ça a l'air d'être mission impossible !

photo: moi en voitureHeureusement, Ali est là ! Ali est militaire (vous ai-je dit qu'ils étaient nombreux ?), a passé deux ans aux États Unis, parle anglais et voit notre air désemparé. Nous demandant où nous allons, il se propose, allant dans la même direction, de nous guider (en prenant le bus, où un passager se fait engueuler comme du poisson pourri parce qu'il utilise son téléphone portable, ce qui est interdit. Pourquoi est-ce qu'on ne fait pas pareil chez nous ?) C'est donc grâce à lui que nous arrivons finalement dans le coin de la fuar (prononcez foire, et voyez comme sont les choses, ça veut dire exactement ça) où nous nous présentons à l'agence de location de voiture. Enfin ! Nous n'allons plus être tributaire des bus !

Enfin, ça, c'est si nous réussissons à quitter la ville. J'ai rarement eu l'occasion de louer une voiture en France, je ne sais donc ce qu'il en est au niveau de l'essence. Ici, on a droit au même coup qu'en Jordanie il y a un an : on nous donne une voiture avec une réservoir vide, et on nous fais comprendre que les trois gouttes qui restent au fond du réservoir sont largement suffisantes pour arriver à une station service.

Certes.

Le problème, c'est que trouver une station service dans une grosse ville quand tu ne sais pas où elles sont et que les indications routières ne te permettent pas de savoir simplement dans quelle direction aller si tu souhaites simplement sortir de la ville (c'est pire que la Belgique ici !) Nous nous retrouvons donc à tourner avec un réservoir vide dans un patelin inconnu en priant la providence pour qu'elle daigne mettre une station sur notre route, ce qu'elle fait, mais c'est une station GPL-Only, argh ! Ça existe, ça ?

la carte

Heureusement, il y en a une autre quelques centaines de mètres plus loin où nous pouvons faire notre premier plein turc : 100YTL ! Ça fait quand même près de 65€ quand même, c'est chêêêr ! Avoir une voiture dans ce pays est un luxe.

photo: un chat d'ÉphèseUne fois sûr de pouvoir avancer un nombre non négligeable de kilomètres, nous pouvons enfin nous lancer sans inquiétude sur les routes. Nous finissons par trouver un sortie, puis l'autoroute, et après un certain nombre de kilomètres et un pique nique sur une aire de repos (nous avons acheté un pain pas terrible hier, mais il faut lui reconnaître une qualité : il est aujourd'hui pas terrible exactement de la même manière, il n'a ni durci, ni molli, c'est toujours le même pain,) nous arrivons à Selçuk, le village le plus proche d'Éphèse. Nous trouvons une pension et il est encore assez tôt pour aller à pieds jusqu'au site, allez hop !

photo: Julie à ÉphèseAprès une demi-heure de marche, nous voilà dans les cartes postales : tout le monde a déjà la façade de la bibliothèque sur une carte postale, dans une pub ou un bouquin... Il n'y a pas une brochure publicitaire sur la Turquie sans cette photo là. Sans cette photo là avec une foule gigantesque, puisque c'est un des sites les plus touristiques du pays, sauf que ce soir, il n'y a personne... Un des problèmes des vacances en cette saison, c'est qu'à 17h, il fait nuit, ce qui fait des journées fort courtes pour des visites souvent forcément diurnes. Ce soir, pourtant, c'est une bénédiction : arrivé vers 16h 30, nous avons vu passer les derniers groupes sur le chemin du retour et devant cette fameuse façade, nous étions seuls. Un moment qui se savoure.

photo: Julie à ÉphèsePuis, comme il ne faisait pas tout a fait nuit, nous nous sommes promenés un peu sur le reste du site, qui n'est quand même pas petit, et je me suis une fois de plus amusé à grimper ici ou là sur les pierres, lors que Julie profite de l'ambiance sereine du soir en écoutant les troupeaux se promener sur les coteaux. Moi, sur mes pierres, je m'aperçois que les ruines turques sont des choses trop sérieuses pour les confier aux turcs : Si la bibliothèque a été magnifiquement restaurée par une mission néerlandaise, ça a malheureusement donné des idées aux turcs qui ont moins de moyens, pour preuve ces multiples pierres redressées à grand renfort de béton, beurk.

photo: façade à ÉphèseEn redescendant, nous avons presque la primeur, semble-t'il, de l'éclairage nocturne du site : peu de monuments sont éclairés, et il y a un peu partout des lampes installées, mais non encore branchées. Ça sera prêt pour l'été prochain, peut-être ? En attendant, la fameuse bibliothèque, éclairée au bout de la rue pavée, c'est encore un spectacle à retenir. Comme est à retenir que l'idée n'est pas excellente qui nous fait rentrer à pieds, de nuit, sur une route en travaux - et amputée de ses bas-côtés - non éclairée. Où je me rends compte que Julie est beaucoup plus imperméable au danger que moi (ou alors plus inconsciente, ça dépend du point de vue.)

photo: façade à ÉphèseNous revenons vers la pension en nous demandant ce que nous allons faire ce soir pour le réveillon : pique nique au saucisson dans la chambre ou demander au gérant s'il connaît un endroit où manger ? Nous n'avons pas le temps de poser la question : à peine arrivé, il nous demande lui même ce que nous faisons, parce qu'il a un amis qui organise un repas de grillades ce soir. Ah ben tiens, pourquoi pas ? Ok, nous sommes partants.

Il passe donc nous prendre trente minutes plus tard[1], sapé comme un mylord, si j'ose dire. En costume italien parfaitement ajusté, impressionnant de chiquitude, et il nous emmène dans un autre hôtel, tenu par un de ses copains, où se déroule le repas.

photo: la grande rue d'ÉphèseLe repas est plutôt en petit comité : hormis nous, on trouvera notre patron, celui de l'hôtel où nous sommes avec deux copains, le cuisinier, deux hong-kongaises fortement libérées et Pierre, un français, routard au long cours, qui arrivera en plein milieu du repas de Cappadocce, via Pamukkale. Le menu ne correspond pas forcément à notre conception du repas de fête, mais je me régale pas mal : Du riz avec des boulettes de viande. C'est bête, mais pour les boulettes de viande, les turcs ne craignent personne, et ce riz, bien que bête riz au beurre, et tout simplement parfait, surtout quand on sait que juste avant, nous avons eu droit à un mezze que nous croyions être le repas complet, tellement il était copieux.

photo: Éphèse, la bibliothèque

Au long du repas, Pierre nous raconte ses voyages, des vrais, pas de petits voyages de dilettante. Il a pas exemple voyagé trois ans, seul, en routard, en Asie. Perso, nous n'en sommes pas encore là : Julie voyage pour se dépayser, voir d'autres gens, d'autres paysages, et moi je voyage principalement ... parce que Julie voyage, et aussi parce que c'est à chaque fois une victoire sur moi-même, sur ma peur de l'inconnu. Je suis comme un chat : je ne me sens bien qu'à l'intérieur de ma zone de sécurité, autrement dit du territoire que je connais. Et chaque voyage, chaque déplacement, est pour moi l'occasion d'agrandir le territoire que je connais, et donc d'élargir ma zone de sécurité. J'étais terrifié à l'idée de partir en Turquie, comme je l'avais été avant de partir en Jordanie, mais j'en reviens avec une peu plus de connaissance de l'ailleurs, et c'est une ailleurs qui ne me fait plus peur (ou plus trop.) Je ne regarde définitivement plus les images des endroits que j'ai visités de la même façon. Je ne suis pas loin de penser qu'on devrait obliger les gens à voyager et à se confronter à des cultures qu'ils ne connaissent pas : on n'a peur que de ce qu'on ne connaît pas.

photo: Éphèse de nuit

Pendant que nous mangeons et discutons avec Pierre, les Hong-Kongaises ont l'air d'être vraiment à l'aise avec nos hôtes turcs, qui sont eux-mêmes très à l'aise avec le raki et la vodka, sauf notre patron, qui s'est sapé parce que la nuit du réveillon est la seule nuit de l'année ou il y a une tolérance sur les jeux d'argent, et il a bien l'intention d'en profiter pour aller tenter sa chance... Il faut dire que les turcs, ne fêtant pas Noël, concentre toutes les fêtes de fin d'année que nous connaissons sur cette seule nuit, nul doute qu'il doit parfois y avoir quelques excès.

photo très sombre
Julie devant la cheminée
(oui, il faisait très sombre.)

Notre hôte finit par revenir, l'air dépité. A-t'il gagné ? Do I really look like someone who won ? Nous tenons difficilement, mais par principe, jusqu'à minuit avant de rentrer à la pension tandis que des coups de feu égayent la nuit : Bonne Année !

Notes

[1] mises à profit pour recalculer l'itinéraire, puisque nous avons déjà visité le site, et que notre programme y consacrait la journée de demain. On notera que comme d'habitude, nous sommes des visiteurs assez rapides...

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Commentaires

1. Par martin, le 18/01/2006 à 01:31

Je constate avec bonheur que je ne suis pas le seul à écrire toujorus au lieu de toujours et nosu à la place de nous. Il paraît que les claviers azerty et qwerty ont été conçus pour ralentir la frappe sur les machines à écrire parce que sans ça les tiges métalliques s'emmêlaient pendant qu'on écrivait.

Au fait, selçuk, c'est de là que vient la dynastie des seldjoukides ?

PS : bon dieu, je viens de découvrir les joies du RSS, c'est quand même génial... Je m'apprêtais à aller me coucher quand tout à coup, hop, un mail de xave.org...

2. Par xave, le 18/01/2006 à 06:58

Bien entendu, j'ai corrigé du coup.

Non, ils ne viennent pas de là, mais il y a un rapport : la Dynastie tire son nom de Selçuk Bey, son fondateur au tout début du Xème siècle. Et deux ou trois siècles plus tard, ils envahissaient la région, donnant leur nom à la ville.

Il faudra que j'y retourne un de ces quatre, histoire de voir un peu mieux l'Artémision, une des sept merveilles du monde quand même ! D'accord, il n'en reste plus que quelques ruines, mais avec le recul, ça méritait peut-être plus qu'un coup d'œil de loin... Pareil pour la Citadelle ou la Basilique Saint-Jean.

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