Métaphore

Je ne suis pas pédé et je ne veux pas me marier, alors moi, vous savez, les histoires de mariage homo, ce n'est pas une préoccupation majeure...

Sauf que.

Il se trouve que l'homosexualité, ça ne m'agresse pas, voire je m'en tamponne royalement le coquillard. Évidemment, j'ai tendance à soupirer quel gâchis quand telle belle que j'eusse volontiers convoitée me trouve trop de pénis et pas assez de seins (pour le seins, désolé, j'ai perdu du poids. Pour le reste, euh... je garde, merci) mais il faut bien dire ce qui est : parmi les belles à mon goût convoitables qui ont mieux à (se) faire que moi, les non hétéros sont une minorité, donc être gêné par l'homosexualité féminine parce que ça réduit le territoire de chasse, c'est un petit peu complètement con.

Et puis il y a l'homosexualité masculine. Alors là, attention, c'est autrement plus grave ! Des goudous, ça va, il y en a dans les films de cul, c'est excitant, et puis c'est pas grave, puisque si elles s'amusent entre elles, on voit bien dans ces mêmes films que ce qu'elles cherchent vraiment, c'est l'Homme. Mais des mecs qui se tripotent ? Holy Monsieur Tout Nu Sur La Croix, quelle horreur, c'est une atteinte à l'essence même de la virilité, c'est sale, c'est pervers et contre nature !

Mon avis tout personnel est que pour se sentir aussi facilement agressé par le comportement des habitants d'un village^[1] où on ne t'a même pas invité, il faut avoir un sacré problème avec sa propre virilité et la croire susceptible d'être renversée un peu trop facilement. Mon sens de l'auto-ridicule est excessif au point de m'avoir toujours empêché de me trémousser sur une piste de danse et me rendrait sans doute mal à l'aise si je venais à me promener dans la rue en tutu rose, mais ça ne remettrait pas en doute ma virilité, je n'ai pas besoin de la prouver aux autres, je sais qu'elle est, point.

Quand je vois des mecs s'embrasser, c'est pareil : je ne me sens pas en danger de ce côté-là. Et même si demain je venais à coucher avec un mec, parce que la vie est faite d'expériences^[2], je ne vois pas en quoi ça me remettrait en cause, moi, en tant que mec. Ouais, j'ai pas de poils, je hais le sport, je suis délicat et sensible, et je ne me trouve pas moins mâle pour autant^[3]. Et toi, c'est quoi ton problème ? T'as besoin de traiter les filles comme de la merde et d'éradiquer les pensées impures pour te sentir viril ? Ah oui, parce que bonjour les pensées impures, hein ? Quelqu'un peut m'expliquer pourquoi partout où on glorifie le corps masculin, on déteste encore plus l'homosexualité ? On ne s'est pas rendu compte ici ou là que les opposants les plus bruyants à la sodomie avaient un problème avec ce qu'ils avaient envie de faire de leur propre bistouquette ?

Mais je m'énerve, je m'emporte et je ne dis rien. J'ai des potes homos, je vais plus facilement vers eux parce que je les trouve en règle générale moins blaireaux que les hétéros (même s'il y a des cons partout, bien sûr.) J'aime bien aller vers eux pour comprendre les problèmes que ça pose encore à vivre. Je suis allé boire un coup au Stonewall Inn parce que ça me semblait un morceau d'histoire important, même si ce n'est pas mon histoire personnelle. En fait, l'égalité des droits, l'égalité des chances, ça me semble super important. Et j'en parle avec les gens justement parce que ce n'est pas mon problème, parce qu'on ne peut pas me soupçonner de prêcher pour ma chapelle, parce que je considère que c'est important intrinsèquement, et que même si je ne me bagarre pas plus que ça (non, je ne défile pas à la Gay Pride) rien que montrer qu'on est concerné, en tant que citoyen, alors qu'on n'est pas touché par le problème, c'est un geste qui compte.

Et en tant que citoyen, à chaque fois que je vois les attaques d'apoplexie que font certains à la simple idée du mariage homo en France, j'ai envie de mettre des claques. Un jour, j'ai réfléchi deux minutes et je me suis dit que cette inégalité de droits était injuste, et qu'il fallait inventer pour les versions non mâle/femelle des couples un truc qui ne soit pas le mariage, mais qui donne exactement les mêmes droits. Et puis un autre jour j'ai réfléchi quatre minutes et je me suis dit que j'étais complètement con : à quoi ça rime de donner un autre nom à exactement la même chose ? Donc au final, est-ce que je suis pour le mariage homo ? Ben bien sûr, Arthur !

Il y a un truc que je trouve ridicule, c'est ces gens qui pédalent en arrière le plus fort possible pour que ça n'arrive jamais : hé, bande de connards, c'est déjà fait ! Non, ce n'est pas dans la loi, oui, on tape toujours sur les pédés, mais ce n'est pas la question : ça va arriver. C'est évident que ça va arriver, le monde va dans ce sens-là, de plus en plus de pays l'autorisent et à part les branques de Californie, une fois que c'est fait, personne ne revient dessus. Je ne voudrais pas tomber dans la facilité en causant du pays des Droits de l'Homme, tout ça, parce que ça fait rire tout le monde depuis au moins 2002, mais regardez un peu les voisins, proches et lointains, et allez-y, soyez plus réacs que les Argentins, les Slovènes ou les Portugais, voire des Taïwanais, tiens, qui sont en train de s'en occuper.

Je suis juste scié de voir les efforts que font certains pour essayer de freiner ce qu'un demi neurone permet de voir comme le cours normal des choses. Ça va tellement arriver que vous pouvez considérer que c'est déjà fait, vous ne l’empêcherez pas, vous ne ferez que le retarder. Alors vous n'avez rien de mieux à foutre ?

La prochaine fois, je vous parlerai des arabes.

Mise à jour : coïncidence qui tombe bien, pour ceux qui pigent l'anglais, je viens de voir la vidéo suivante (via Otir) :