Yoga bruyant
L'autre soir, je suis allé voir un copain que je n'avais pas vu depuis très longtemps, depuis notre dernier concert ensemble, il y a trois ans (dans mon mode de fonctionnement, on n'est pas obligé de se voir régulièrement pour rester potes, et ces trois années ont été... un peu n'imp.)
Bon, ce soir-là, il n'était pas dispo pour aller boire un coup, parce qu'il répétait avec son nouveau groupe, et c'est très bien : je n'avais pas vu une répète de groupe depuis très longtemps, depuis notre dernier concert ensemble, il y a trois ans. J'étais donc tout content de les voir, lui et sa copine, et tout content d'aller écouter de la musique aux plus que premières loges.
À l'époque où nous jouions ensemble, nous faisions de la musique progressive. Maintenant, son groupe fait de la musique progressive, mais ce n'est pas pareil : là où nous étions capables de tenir trente minutes en impro sur un accord (sans que le public se lasse, j'y tiens), ils reprennent eux des morceaux aux structures très compliquées qui nécessitent une technique et surtout une précision qui n'étaient pas ce pour quoi nous étions le plus connus.
J'ai donc profité de mon concert privé, jusqu'au moment où je me suis vu proposer de prendre la basse sur un des morceaux communs aux répertoires des deux groupes : Atom Heart Mother...
(je vous recolle ici une des versions de mon groupe, il n'y a pas eu d'enregistrement la semaine dernière, ce que je déplore.)
Moi, ça me disait bien, même si je n'étais pas très sûr de moi, parce qu'il faut bien l'avouer, je n'ai pratiquement pas touché une basse depuis très longtemps, depuis notre dernier concert ensemble, il y a trois ans. Mais je ne me suis pas fait prier parce que j'en avais trop envie : la basse, c'est mon instrument le plus physique, celui que je considère comme mon instrument principal, et pour être tout à fait honnête, le seul où je me sens suffisamment à l'aise pour accepter les compliments qu'on me fait parfois : je pense que je ne joue pas mal.
Vous savez quoi ? C'était bien ! Je n'ai pas eu l'occasion d'entendre leur version du morceau, mais je l'imagine beaucoup plus structurée que la notre[1] et en plus des trois ans sans jouer, j'ai du faire un effort pour suivre parce que l'arrangement était différent de ce à quoi j'étais habitué, mais -si vous me permettez ce langage, et vous seriez gentil de le faire parce qu'il correspond bien au ressenti - putain de bordel de boule à bite en bois, c'était bien !
C'était étrange, parce que c'était la première fois depuis dix ans que je jouais avec un autre batteur. Il m'est d'ailleurs arrivé de me demander si j'y arriverais, mon Boumboum et moi ayant développé au fil des années un connaissance instinctive l'un de l'autre, le genre qui fait la cohésion d'une section rythmique, donc d'un groupe. D'ailleurs si vous avez besoin d'une section rythmique qui poutre, faites appel à nous, nous transformerons n'importe quoi en gros rock qui tâche (nos modèles sont respectivement la section rythmique de Led Zep et celle de Cream.)
N'empêche que des années à jouer ensemble, ça amène une connaissance de l'autre qui n'est pas limitée aux instruments qui structurent derrière, comme je m'en suis rendu compte dès que la guitare de mon pote et ma basse ont commencé à dialoguer : quand nous jouons ensemble, il y a un truc qui se passe. Dun seul coup, il y a une émulation, d'un seul coup il y a du plaisir, et d'un seul coup, c'est du rock ! Le morceau a sans doute duré entre un quart d'heure et vingt minutes, et au bout, j'étais vidé et heureux.
Je suis fatigué, depuis des années, c'est devenu partie intégrante de ma nature, et puis c'est un peu normal vu mon rythme (genre j'ai passé deux week-ends chez moi depuis début juillet, mais j'espère en passer un troisième dans quatre semaines.) J'aimerais bien parfois me reposer, mais je ne suis pas câblé comme il faut pour ça : si je m'arrête, j'ai la tête qui tourne à vide, c'est tout sauf reposant. Je me serais bien mis au yoga, mais vraiment, le vide dans la tête, c'est juste pas possible. D'où cette question récente de la Dame d'Icelles : Et qu'est-ce qui vous permettrait de vous détendre ?
Réponse évidente : jouer de la basse, jouer du rock. Arriver à cet état d'épuisement heureux, tout donner à un instrument qui après tant d'années est devenu une extension de moi. Quand je joue de la basse, je ne réfléchis plus : je vis.
Et j'aime ça.
Note
[1] Lors de ce fameux dernier concert, nous avons un petit peu tout donné, nous étions en forme, nous avons joué quatre heures et le dernier morceau avant rappel était justement un Atom Heart Mother en feu de trente-cinq minutes !
Publié le 08/10/10, dans la rubrique Petits bonheurs.
(lire d'autres billets sur : basse )
Commentaires
1. Par Franck, le 08/10/2010 à 14:15
2. Par xave, le 08/10/2010 à 14:22
3. Par Franck, le 08/10/2010 à 14:46
4. Par Ophélie, le 08/10/2010 à 16:23
5. Par Fiev, le 09/10/2010 à 22:01
6. Par Fiev, le 09/10/2010 à 22:08
7. Par syd, le 05/11/2010 à 16:54