Parker & Yanowski - le Cirque des Mirages

Les villes sont pleines d'amour et de douleur
Deux plantes dont la mort est la commune fleur.

Guillaume Appolinaire.

Deux mille ans de mensonges,
De morale hypocrite
De châtiments sans nom
Tout ça pour une cuite !

La véritable Histoire du Christianisme.

La culture de masse, c'est bien, mais parfois j'aime bien aussi qu'on me résiste. Je ne cours pas forcément après l'inaccessible, mais j'ai toujours pensé pensé que le meilleur moyen de progresser dans la connaissance, quelle qu'elle soit, était de viser à chaque fois un peu au dessus de ses possibilités : en dessous, il n'y a pas de progrès, trop au dessus, on n'y arrive pas.

La musique, c'est une connaissance aussi, tout ce qui est culture est connaissance, du coup j'y applique la même façon de voir, que ce soit celle que je joue ou celle que j'écoute. J'ai donc les oreilles grandes ouvertes quand je passe à coté de quelque chose qui est connecté à un univers que je connais, mais quand même dehors.

Et justement, le Cirque des Mirages, c'est connecté à ce que je connais, mais c'est quand même dehors. Au premier coup d'oreille, j'ai reconnu quelque chose, sans savoir dire quoi, et j'ai tout de suite été gêné par d'autres choses, sans savoir lesquelles non plus. Bon, ben il n'y a pas trente-six solutions : il faut approfondir la question.

Llega a golpear con su anillo sin piedra
Con sus labios sin dientes llaga la muerte
Llega para gritar con su boca sin lengua
Con sus labios sin dientes llega la muerte

pochette de le disqueLe Cirque des Mirages ? Mais qu'est-ce ? C'est le nom de l'album de Parker et Yanowsky. Ou alors c'est le nom du duo qui vient de sortir l'album Parker et Yanowsky ? Je ne sais pas trop : Parker et Yanowsky ne se nomment dans la vraie vie ni Parker, ni Yanowsky mais Frédéric Aliotti et Yann Girard. Le premier est pianiste, le second est chanteur, encore que chanteur soit un peu court : il y a une part de comédie dans ces chansons là.

J'ai très vite trouvé ce qui me gênait : dès la première écoute, dès les premiers mots, la voix est excessivement empruntée. On entend parfois des intonations de Serrault dans la cage aux folles... Pas tout le temps (ouf) mais ça ressort de temps en temps. Il y a dans tout cet album une espèce de grandiloquence qui peut être rebutante... Tant qu'on n'est pas entré dans l'univers. Parce que tout ça est fait avec franchise, une fois qu'on est immergé dans l'ambiance, on n'a plus envie d'en sortir.

Et si vous aussi vous possèdez chez vous un animal difforme ou un enfant atrophié, n'hésitez pas à nous le confier et nous vous le rachèterons pour seulement dix pences !

Certains en ont parlé avant moi qui ont mieux trouvé les mots, ayant plus de culture que moi, mais c'est vrai que ce à quoi on pense très vite, en vrac, c'est une certaine chanson réaliste, c'est le cabaret allemand des années vingt, c'est Tod Browning et Freaks, c'est les montreurs de monstres des cirques glauques de la fin du XIXème siècle. Et ça, c'est tout sauf du Obispo !

Ce n'est effectivement pas le genre de musique qu'on met dans un ascenseur ou un supermarché pour qu'elle rentre dans l'oreille des gens sans en avoir l'air : Les quelques personnes à qui j'ai essayé de faire écouter ça ne m'ont pas remercié. Par contre, j'ai un cas de quelqu'un qui m'a demandé de ne pas écouter ça en sa présence alors que je l'avais mis en musique de fond et qui a vraiment apprécié après l'avoir réellement écouté. C'est qu'ils savent conter, les gaillards. Et c'est vrai que ça s'écoute mieux avec la bouche ouverte qu'avec les yeux vides.

Comme je n'avais pas de fleurs, j't'ai apporté une jambe.

Une caractéristique de ces chansons, c'est qu'elles sont très physiques, très charnelles : il y a une vraie épaisseur. Le coté physique est d'ailleurs visible sur le disque bonus qui contient une vidéo de trois (seulement trois ? Où est le DVD ?) chanson capturées sur scène. Le chanteur avoue n'avoir pas une grande culture de la chanson française, sauf quelques grands classiques : nommément Brel ou Ferré. Et ma foi, on voit bien la référence. Musicalement, y'en a, comme disent les Tontons. Et au niveau de l'implication physique, c'est assez flagrant aussi. Ça vit, c'est charnel, ça parle autant au coeur qu'à la tête, voilà un mélange qui me plaît.

Si c'est toi, cria Pierre, Ordonne que je vienne ! ...
Ben viens !

Une mention toute particulière pour La Véritable Histoire du Christianisme, chanson joyeusement blasphématoire et particulièrement jouissive qui me laisse toujours dans un état d'euphorie proche de celui qu'on peut ressentir après une grosse poussée d'adrénaline. Je ne sais pas si c'est parce qu'on dirait du Brassens chanté par Brel, si c'est parce que c'est drôle ou si c'est parce que ça tape là où on devrait taper plus souvent... C'est sans doute un peu tout ça et d'autres choses encore.

La prochaine fois, je vous parlerai de musique sérielle.

Commentaires

1. Le mercredi 28 juin 2006, 16:39 par vlaakland

__c'est du léo Ferré, nouvelle version, bravo pour les textes, et la musique qui dénotte une certaine originalité, et nous font penser que la star act,n'en déplaise a beaucoup, malheureusement, n'est pas l'avenir de la chanson française.Du phrasé, une bonne diction, chantant en français, quoi demander de plus! encor bravo , continuez, vous ètes l'avenir!!!Si toutefois les mastondontes vous laissent une petite place pour vous exprimer.Je vous souhaite une longue vie médiatique, malgré mes 60 ans.Pierre.

2. Le vendredi 7 juillet 2006, 15:34 par fabiles

super ! enfin des textes et les voir est bluffant; après la chanson sur le christianisme, la salle s'est levée d'un bond pour applaudir, enfin une véritable "standing ovation" sans personne pour la commander !!!!!continuez, montrez qu'il n'y a pas que les star'ac qui plaisent....

3. Le jeudi 22 février 2007, 00:56 par Nicolas

C'est magnifique ... tout simplement ! Une ambiance extra et des paroles très belles ou très connes mais arrangées de façon géniale. J'adore et je vais certainement aller les voir aussitôt qu'ils seront prés de chez moi :D

4. Le vendredi 27 avril 2007, 22:45 par maëla

Je viens de ressortir de la salle, des étoiles plein les yeux ... Parker et Yanowski savent faire rire, et leur originalité m'a touchée en plein coeur ! Une ambiance chaleureuse et folle, bref, un vrai moment de bonheur ! Et il faut savoir qu'on a pas besoin d'etre vieux pour apprécier, la preuve je n'ai que quinze ans ! A bas les préjugés comme on dirait ...

5. Le mardi 18 mars 2008, 02:45 par eaudelune

Oui effectivement, il a un talent incroyable...Cétait un de meilleurs amis de mon mari,mais depuis son entrée dans ce monde du théatre, yann a complètement oublié ses amis..Peut etre prefére t-il sans doute la compagnie des gens du show bizz à celle d'amis véritables...

tristesse

6. Le mercredi 5 janvier 2011, 16:04 par Collectif Correctif

"là où on devrait taper plus souvent...", on tape bien assez crois-moi.
Et puis pourquoi toujours taper ?

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